QUELS DÉBOUCHÉS DÉMOCRATIQUES A LA CONTESTATION DES PROJETS URBAINS ?
- Urbanistes HdF
- 6 oct.
- 13 min de lecture
Myriam Cau Urbaniste
L’actualité semble plus que jamais brûlante : Face à la montée des contestations dans les projets urbains, la perception des impasses de la fabrication de la Ville aboutit à face à face d’acteurs sans réel débouché démocratique. Que faire ?

Nous vivons un paradoxe de l’action publique : jamais les règles et les injonctions en faveur de la participation des citoyens n’ont été aussi fortes, et pourtant aussi inopérantes à offrir les cadres de création de consensus et de compromis ; La légitimité du pouvoir élu à décider ne peut l’emporter, seul, sous toute autre considération. Des sociologues étudient le processus de désaffiliation civique, dont un des ressorts est cette incapacité des citoyens à impacter les choix, ou à croire qu’ils peuvent les impacter, ce qui peut entrainer de la résignation, du ressentiment et de la colère.
Le cas des projets relevant de l’ANRU est encore plus particulier. Le rapport Mechmache-Bacqué a permis des avancées sur les droits citoyens : association des Conseils, co-production, Maisons de projet. Certains projets sont exemplaires en matière participation, de nombreux se passent à peu près bien, mais c’est très loin d’être le cas partout. Le problème vient du fait qu’il n’existe pas de contrôle sur la qualité et les processus de consultation des habitants. L’ANRU (Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine) reste démunie. Son règlement ou ses consignes précises sur les revues de projet peuvent ne pas être respectés.
D’où vient la contestation grandissante ?
Le premier programme de Rénovation Urbaine impulsé par Jean-Louis Borloo dès 2003 s’est attaqué à des problèmes criants, à une époque où il n'existait aucun modèle économique permettant des démolitions dont une partie était nécessaire et justifiée. Ce 1er programme a été difficile et a perturbé de nombreuses familles instaurant une forme de contrainte sociale, tout en permettant des améliorations des conditions de » l’habiter ».
Le second programme NPNRU (Nouveau Programme de Rénovation Urbaine) arrive en 2014 comme le dernier bras armé possible pour une politique profonde de requalification des quartiers d’habitat social. Action Logement en finance la plus grande part (80%). Il s’attaque à des ensembles plus sensibles quant aux choix à opérer. Le logiciel a peu changé sur le principe central de démolition qui se révèle financièrement beaucoup plus favorable aux bailleurs que la réhabilitation. Cela introduit un biais évident à l’heure des choix.
Par ailleurs, on touche de plus en plus à des ensembles architecturaux qui sont considérés à grande valeur patrimoniale, témoins de l’architecture et de l’urbanisme du 20ème siècle. Si l’ANRU a prévu dès l’origine, un dispositif mémoriel de quartier, rien n’a été pensé quant à la sauvegarde du patrimoine architectural et urbain. La production architecturale et urbaine de toute une époque est ainsi passée ainsi par perte et profits.
Les finalités même de l’ANRU sont questionnées : pourquoi déloger des pans entiers de populations ? Le soupçon s’installe : cherche avant tout à se débarrasser de gens au profit d'une mythique mixité sociale dont ils sont un obstacle. Tout cela se passe dans une grave crise du logement que chacun constate : la difficulté à se loger, les prix des loyers … Les démolitions semblent absurdes. Si améliorer l'attractivité des quartiers pouvait auparavant être un peu entendue, pour la plupart des gens aujourd’hui elle ne doit pas passer par des démolitions. On doit pouvoir transformer le quartier en réhabilitant. Sans compter que le gaspillage incompris des destructions heurte le bon sens et la conscience écologique émergente des milieux populaires.
Dans certains cas, le projet ANRU n’est plus perçu comme une démarche positive de réparation ou de préparation des quartiers du futur : des opérations subies sont vécues comme un coup de force où l’habitant reste un objet plutôt qu’un acteur. Des d’analyses plus radicales inscrivent l’action de l’ANRU comme un errement de la ville néolibérale.
Alors questionnons-nous : face aux projets contestés, quelles issues démocratiques ?
Grandeurs et limites de la démocratie participative
L’histoire de la démocratie participative et délibérative en France est à la fois glorieuse et en panne. Elle a institué un pouvoir de prise de parole des citoyens et innové avec un grand nombre de procédés qui permettent de promouvoir un avis éclairé des citoyens et d’enrichir l’avis des décideurs. Consultation et concertation sont au menu de toutes les opérations d’urbanisme, soit du fait des obligations réglementaires, soit du fait de la nécessité d’y recourir pour améliorer la cohésion locale ou emporter l’acceptation sociale. Il revient aux élus et maîtres d’ouvrage d’en retirer le meilleur. Mais, le plus souvent les participants en retirent déception et frustrations, voire ne se mobilisent pas.
Les faiblesses dénoncées sont nombreuses. Il est rarement possible de mettre à l’agenda un projet qui ne provient pas “d’en-haut”, c’est-à-dire des pouvoirs publics. La consultation porte souvent sur les objets accessoires d’un choix décidé. Les concertations sont peu adaptées à l’appropriation des enjeux du projet (manque de temps, d’outils, d’informations accessibles, de moyens propres…). Elles sont souvent déséquilibrées, avec une domination de décideurs et techniciens très outillés et informés, face à des gens qui découvrent. Le retour organisé sur la consultations-concertations est rarement assuré correctement et entretient le “à-quoi-bonisme”... Quelques rares processus de décision partagée existent : une position négociée peut toujours être validée par une prise de décision publique légale.… C’est possible même si cela reste marginal face à une culture d’une légitimité revendiquée de l’élu à proposer, consulter, et in fine à décider sans forcément rendre compte.
L’intérêt de la co-construction
Le niveau le plus impliquant revendiqué aujourd'hui en matière de projets urbains est celui de la co-construction. Identifié par la Loi de Programmation pour la ville et la cohésion urbaine de 2014, la co-construction fait partie des pré-requis du règlement de l’Agence National pour la Rénovation Urbaine de 2020.
On pourrait le considérer comme une voie royale de la fabrique urbaine, puisqu’il implique décideurs, usagers, parties prenantes dans la recherche des meilleures voies parmi un ensemble de contraintes. Avec des règles du jeu clairement établies au départ, un projet réellement co-construit entraîne rarement une contestation durable ou crédible, même s’il existe des désaccords. Les contestations proviennent souvent de ce que le processus de co-construction est inexistant ou mensonger : on dit qu’on fait ce que l’on n’a pas fait.
Retour historique sur le cas de l’Alma-gare
Déjà en 1970, pour s’opposer à la démolition au bulldozer de tout le quartier de l’Alma-Gare, les habitants avaient réussi une démarche inédite de production collective élus-aménageur/architecte-habitants qui a conduit à réussir un projet alternatif. Le 1er atelier Populaire d’Urbanisme de France a été inventé à l’Alma-Gare, l’État via le Plan Construction et l’école d’architecture de La Villette apportèrent leur concours à ce qui reste une réalisation exemplaire.

50 ans après : bis repetita, la volonté de démolir sur le quartier ces logements emblématiques des années 80 rencontre une franche opposition des habitants qui créent le Collectif non à la Démolition de l’Alma. Cette fois-ci, l’État reste sur son quant à soi. L’association Appuii accompagne la réflexion urbaine des habitants, en aide technique indépendante. Le jeu des acteurs s’est compliqué avec la Métropole Européenne de Lille compétente sur le projet ANRU, mais aux abonnés absents face aux interpellations des habitants. Une nouvelle génération se lève, de jeunes adultes qui ont vécu leur enfance dans ce quartier, n’admettent pas le sort qui lui est fait. Ils reprennent connaissance des racines militantes identitaires de ce quartier qui avait su se faire entendre. Si dans les années 70, la Municipalité avait accepté d’expérimenter une autre façon de faire, en 2024, la situation est celle d’un Maire qui refuse tout dialogue et n’a pas respecté les obligations de concertation. Aujourd’hui la situation est bloquée, malgré un déluge d’initiatives, d’interpellation, de recours, de positive-action et la présence d’alliés des milieux professionnels de l’urbanisme et de l’architecture …
Le Collectif qui préfère le terme de projet alternatif à celui de contre-projet n’entend pas être « jusqu’au boutiste » et accepte certaines démolitions. Ses propositions n’ont pas formellement été examinées. Le chantier de démolition a commencé mais s’est arrêté à la suite de dégradations impactant les entreprises mission
nées. Le bâti a commencé à être déconstruit. Les positions se raidissent et la situation locale pâtit de l’approche des municipales. Nous en arrivons à un chantier conduit sous une présence policière inédite en France, avec des entraves quotidiennes aux déplacement des habitants du quartier et une répression assumée à l’égard de certains. L’emblématique 165 rue de l’Alma est tombé. C’est là que se trouvait l’ancien bureau de la SAEN (Société d’Aménagement et d’Équipement du Nord) qui a aménagé ce quartier.
Quid du contre-projet comme alternative au projet contesté …
L’idée de passer par l’élaboration d’un contre-projet est souvent la résultante d’un dialogue inexistant ou d’un dialogue de sourds. Les personnes concernées décident de définir à partir de leurs attentes un projet qui satisferait aux revendications urbaines et sociales.
Leur démarche est moins de prétendre à la technicité de l’urbaniste ou du maître d’ouvrage que d’ouvrir un rapport de force pour gagner l’intérêt des décideurs et de créer un espace pour réviser le projet prévu. En ce sens, le contre-projet est un débouché possible face à la seule conflictualité des acteurs. Le contre-projet permet une pédagogie : il traduit les revendications, et devient un outil de médiation concret et plus positif pour discuter des désaccords initiaux et se placer en force de proposition.
Le contre-projet est perturbant pour le maître d'ouvrage ou l’élu, mais aussi profitable. Le risque pris est de réussir un projet mieux adapté aux attentes urbaines et sociales et qui tienne compte de la richesse de la maîtrise d’usage. Pour engranger ce profit, il faut que l’élu accepte d’entendre, aux côtés de sa légitimité lié au suffrage universel, d’entendre aussi celle, plus simple, des gens qui “habitent” la ville.
Ainsi dans la notion de contre-projet, il ne s’agit pas d'opposer deux projets mais de rechercher les voies acceptables sans qu’il y ait un gagnant et un perdant. Ce n’est pas l’un ou l’autre, c’est un chemin à trouver. Le contre-projet ne consiste pas en une idée vague, sa valeur consiste à rechercher dans l’expertise d’usage des leviers pour raconter le futur souhaité. Il doit être écrit, spatialisé, raconté, inscrit dans un processus de réalisation que l’on pense atteignable. Le contre-projet est aussi perturbant pour les institutions, il oblige à réviser des process et des calendriers, il exige une souplesse de la technocratie administrative.
Alors, si la contestation, même construite à travers des propositions alternatives, n'a pas de débouché politique et institutionnel, comment avancer ? Quelles voies pour sortir démocratiquement des face-à-face ?
AMÉLIORER CE QUI EXISTE …
1. Face aux dysfonctionnements du dialogue entre les villes, les intercommunalités et les habitants, il importe de mieux spécifier les pré-requis de la co-production, la co-production n’est pas un mantra mais un mode de faire qui doit être défini. Il est essentiel aussi de mieux organiser la transparence et l'accès à l’information. Il est nécessaire de rappeler le primat de la décision politique mais aussi celui du dialogue à toutes les étapes du projet. Les lignes directrices relatives à la participation civile aux décisions politiques adoptées par le Conseil des Ministres Européen en 2017 doivent être respectées.
2. Renforcer les conditions de respect du règlement de l’ANRU
· L’ANRU pourrait induire une clause de mise en suspens si son règlement n’est pas respecté, faire appel à un garant de la concertation si besoin.
· La représentation des habitants aux instances de gouvernance du projet ANRU doit être confortée. Par exemple, sur l’obligation de représentation des habitants dans les revues de projet[1] : “Les conseils citoyens seront également associés, ainsi que tous autres représentants d’habitants associés à la co-construction du projet dont le Délégué Territorial de l’ANRU jugerait la présence utile.” Il ne peut s’agir d’un unique représentant du conseil citoyen, bien démuni face à l’ensemble des techniciens et représentants de la Ville et des maîtres d’Ouvrage. Il ne peut non plus s’agir d’un représentant agréé par la ville parce que manipulable.
· Lors des revues de projet ANRU, la “veille du respect des fondamentaux du projet”, est examinée : la co-construction avec les habitants et leurs représentants en fait partie et doit être vérifiée. Cela ne peut se fonder sur le seul déclaratif de la ville et de l’Intercommunalité.
3. Les obligations légales sur le retour des enquêtes publiques est encore mal assuré, il devrait y avoir une obligation de réponse du maître d'ouvrage à chacune des observations, et non selon un choix sélectif, et un effort de communication pédagogique.
… AMÉLIORER MAIS AUSSI OUVRIR DE NOUVEAUX DROITS CITOYENS
Face à certaines formes d’impasse, de nouveaux droits citoyens doivent être ouverts et les nouvelles formes d’action devraient pouvoir être reconnues.
Des pistes sérieuses ont été ouvertes par la proposition de Loi “Démocratiser la rénovation urbaine et le logement” résultant du travail de la Coordination Nationale Pas sans Nous, de l’association Appuii, de l'Alliance Citoyenne, de la CRUE Commission Rénovation Urbaine d’Étouvie et de la Fondation Abbé Pierre. Nous en reprenons des éléments ci-dessous (avec la mention PLD dans le texte), parmi un ensemble plus vaste de propositions.
1. Une animation outillée de la concertation est nécessaire. Trop souvent les habitants ont l’impression d’être utilisés et mobilisés pour des concertations de principe. La qualité des méthodes, des processus, la pertinence du calendrier eu égard au projet constituent des pré-requis.
2. Mieux organiser la transparence et l’accès aux documents
Le renforcement des compétences citoyennes est un enjeu d’équilibre du dialogue. Les documents techniques (plans, programmes, comptes-rendus…) doivent pouvoir être accessibles en ligne, compréhensibles et fournis à temps (PLD). La CADA doit étoffer et communiquer sa doctrine sur le cas des projets urbains. L’accès aux documents doit pouvoir être élargi à certains documents de travail avant la prise de décision, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
3. Consacrer des moyens pour permettre l’élaboration d’un projet alternatif
Il s’agit moins de le voir comme un outil qui veut se substituer au projet officiel, que comme un élément du dialogue sur les attentes et contraintes de chacun. Accepter cette notion revient à accepter de lui donner des moyens : accès aux informations, accès à une expertise accompagnante dédiée aux habitants, financement pour des actions de pédagogie, de mise en forme, d’animation de la dynamique locale… L’alternative au projet contesté doit pouvoir faire l’objet d’un réel examen de faisabilité par les décideurs (Ville, Maitres d’Ouvrage).
4. Un Droit à l’initiative Les habitants, les organisations locales doivent pouvoir demander l’examen de propositions et d’actions qui ne figurent pas dans le projet initial. L’initiative doit être examinée, la décision prise en retour : positive, négative ou amendée doit être argumentée.
5. Une consultation référendaire des résidents pour voter sur les choix de démolition et de réhabilitation (PLD). Il existe déjà une obligation faite aux bailleurs de recueillir l’avis favorable d’une association de locataires représentative et de ne pas rencontrer une opposition de 50% des locataires en cas de réhabilitations HLM. Comment se fait-il que cette disposition n’a pas été reprise en cas de démolition ?
6. Expertise indépendante aux habitants Il faut donner aux habitants et aux associations, les moyens en expertise, des financements ou la possibilité de recourir à un pool d’appuis indépendant, avec des compétences en urbanisme, animation participative, en droit… Pour autant, le lien avec les institutions doit être prédéfini et mis en œuvre : en effet, il doit y avoir une incrémentation possible du projet, un enrichissement collectif des acteurs. Il faut sortir du face à face élus / habitants. En cela, même 50 après, l’exemple de la “Maitrise d’Ouvrage Collective” de l’Alma-Gare, incluant élus, techniciens et habitants reste une réponse pertinente et novatrice.
7. Fonds pour une démocratie d’initiative citoyenne (PLD)
Il s’agit de financer l’organisation collective citoyenne et la contre-expertise indépendante. Les ressources pourraient émaner du projet (1% du montant des travaux HT), avec une gestion paritaire au plan national : État, Maîtres d’Ouvrage, Habitants.
8. Un droit au réexamen du projet impliquant les habitants En cas d’impasse avéré du dialogue et persistance d’opposition sur les choix d’aménagement, pour des opérations complexes s’inscrivant dans la durée, il devrait y avoir une possibilité de recours non judiciaire, qui permettrait d’engager un réexamen organisé du projet impliquant les partenaires et les habitants sous l’égide de l’État et d’un garant. Il s’agit de donner une seconde chance à la Co-construction. Ce droit au réexamen argumenté doit être inter parties -prenantes
9. Le recours à tiers-garant de la concertation (PLD)
Par analogie à la démarche procédurale de la CNDP (Commission Nationale du Débat Public), au-delà d’un certain impact du projet en termes de démolition et de réhabilitations prévues, il peut être demandé la saisine d’un garant, afin de certifier la tenue d’une concertation large, équitable, neutre par les Maîtres d’Ouvrage.
10. Le recours à la Commission Nationale du Débat Public (PLD)
La CNDP dispose d’une expérience longue et reconnue, elle pourrait voir s’élargir son champ d’intervention aux grands projets urbains.
11. Des “assemblées de compte-à-rendre” (PLD)
L’organisation d’assemblée à la demande des citoyens permettrait que les décideurs justifient en quoi elles ont tenu compte des avis des habitants et de motiver les arbitrages et les éventuels refus.
12. Des processus de “dialogue territorial”
Cette pratique permet d’avancer vers la résolution des conflits. Elle s’inscrit dans le courant des méthodes de la médiation et de la négociation raisonnée. Il s’agit de rechercher un ou des accords, pas seulement de recueillir ou d’échanger des arguments. C’est une démarche qui pose un postulat relationnel à la résolution des problèmes : elle requiert une posture précise dans une approche exigeante de la participation. On sort avec le dialogue territorial de la coopération symbolique à la coopération débouchant sur un pouvoir effectif. Tout le monde doit être impliqué et une partie prenante doit être reconnue comme “légitime” pour décider en dernier ressort et boucler le processus. Une des conditions est de dialoguer à partir des intérêts et besoins des acteurs et non pas des revendications, pour rechercher des concessions équilibrées.
13. Des pratiques de « community organizing » On parle de démarches d’organisation communautaire, parfois appelées « syndicat de quartier ». Saul Alinsky est considéré comme le fondateur de cette notion née aux USA. C’est une action de « pouvoir citoyen » organisée pour influencer les décisions qui impactent la communauté. Elle permet de constituer des collectifs citoyens capables de structurer des actions et des revendications partant des besoins de la communauté. Elle offre aux pouvoirs décisionnaires des interlocuteurs.
CONCLUSION
Face à la contestation du projet urbain, l’urbaniste se retrouve à la croisée des chemins : cela interroge son métier et sa capacité à appréhender une situation de façon systémique pour contribuer à créer les meilleures conditions d’émergence et de réalisation du projet. La nécessité de dépasser les impasses questionne aussi sa posture professionnelle, au cœur des jeux d’acteurs, au service d’une commande, mais avec des obligations déontologiques. De quel côté est l’urbaniste, où va sa loyauté de professionnel ?
Si l’expertise, des méthodes expérimentées, peuvent aider à clarifier les enjeux politiques dans le “champs des affaires de la cité”, il subsiste bien des pratiques professionnelles à faire évoluer par exemple en s’appuyant sur le design thinking, le dialogue territorial, et des zones d’exploration à développer : en s’autorisant à partir des pratiques de terrains, à tester des alternatives, à s’engager dans l’urbanisme de transition, à ouvrir des espaces de co-décision… Cette évolution souhaitable ne peut échapper aux cadres de l’action publique, mais peut s’attacher à en exploiter les interstices possibles et contribuer à faire bouger les lignes. Il existe donc une responsabilité de l’urbaniste à évoluer dans ses pratiques, à expérimenter et à inventer des voies.
La profession a déjà travaillé sur une approche démocratique de l’urbanisme et du projet, notamment au plan européen. On trouvera des lignes de conduite claires dans la charte de l’urbanisme européen qui établit par exemple que “L’Urbaniste s’engage à conseiller, à faire la médiation et à gérer les conflits, à promouvoir l’action concertée”. Enfin la Charte sur la Démocratie participative liée aux processus d’aménagement du territoire pose une ambition claire quant au rôle de l’urbaniste, cette charte est signée par un nombre croissant de collectivités en France. La relire aujourd’hui est très ressourçant, pour conserver une boussole bienvenue dans des situations complexes de tension urbaine.
[1] la note d’instruction ANRU Note d’instruction de la Directrice Générale de l’ANRU relative à la méthodologie des revues de projet devant être conduites dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU)
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